Direction l’Orient avec cette petite douceur de Souad Massi. La chanteuse cinquantenaire fête son dixième album en 2022, qui s’ouvre sur Dessine-moi un pays, hymne d’espoir en liberté, sur fond de mélancolie et de souvenirs douloureux.
L’artiste, marquée par l’étendue des conflits dans le monde, propose cette chanson chantée en arabe algérien, qu’il m’est possible d’analyser au bénéfice d’une traduction en français (non, je ne comprends pas encore l’arabe).
L’artiste, marquée par l’étendue des conflits dans le monde, propose cette chanson chantée en arabe algérien, qu’il m’est possible d’analyser au bénéfice d’une traduction en français (non, je ne comprends pas encore l’arabe).
Instrumentation feutrée
Souad Massi pose sa voix sur une guitare acoustique en arpèges. Plus intimiste encore que le piano-voix, le guitare-voix fait ici des merveilles.
Au deuxième couplet apparait l’ensemble à 4 cordes (violons et altos, la musique chaâbi raffole de l’alto). C’est comme un nappage caramel sur un bon dessert : c’est lisse, c’est doux et sucré, et c’est tellement bon !
Deux instruments solistes font leur apparition : une guitare solo (vers le début) et une flute traversière, tenue par Naïssam Jalal, flutiste franco-syrienne. (Elle joue aussi du ney, flute orientale très présente dans la musique arabo-andalouse, mais ici il me semble que c’est bien de la flute traversière, qui possède plus de puissance dans les graves, et qui est plus précise sur les notes.)
Harmonisation en quintes
Les couplets ont tous la même harmonie : ils oscillent entre les degrés 1, 2, 5 et 1 (donne l’occasion d’utiliser la fameuse cadence 2-5-1 : on joue le deuxième degré (ici do♯ dim), puis le cinquième (ici fa♯) avant d’« atterrir » sur le premier (si mineur).
Sur le refrain, tout s’accélère : c’est un grand « cycle des quintes. » Deux par mesure, sur quatre mesures, tous les degrés y passent, et sont séparés à chaque fois de quintes (descendantes). mi (ré do si) la (sol fa mi) ré, etc.
- 4° (mi mineur)
- 7° (la)
- 3° (ré)
- 6° (sol)
- 2° (do♯ dim)
- 5° (fa♯)
- 1° (si mineur)
C’est, en fait la même logique que le 2-5-1, mais on part de beaucoup plus loin, depuis le degré 4.
Paroles pour un monde sans guerre
Au travers de l’aphorisme « Dessine-moi » (évidemment calqué sur la célèbre demande du Petit Prince à l’aviateur, « dessine-moi un mouton »), on ressent un soupir pour un monde idéal, où la paix règnerait enfin, au travers de métaphores parlantes.
Dessine-moi…
… une maison avec de grandes fenêtres
… un oiseau libre, que personne n’a acquis
… un sentier au mileu d’une forêt
… une mer peu profonde
… des êtres chers disparus
… un pays sans gouverneurs iniques et sans guerre
… le sourire d’un résistant
… un pays qu’aucun autre artiste n’a encore dessiné
Quoi de plus légitime que de soupirer après ce monde-là ? Notre « pays », la terre que nous habitons, est depuis la nuit des temps plongée dans le conflit. Conflit de civilisations, de peuples, de religions… mais aussi conflits personnels qui ravagent toutes nos relations.
Le clip de la chanson met en scène la chanteuse face à une œuvre d’art prenant vie dans ses souvenirs. Les réminicences semblent douloureuse, reflets d’une mémoire embuée par la souffrance, liée à l’exil, à la guerre.
Plus de guerre
À la quête d’un monde en paix, enfin débarrassé des violences les plus sombres, la Bible apporte une réponse ! C’est exactement le plan de Dieu, que de mettre un terme à tout cela. De promettre l’avènement d’une nouvelle terre où, selon les paroles d’un prophète :
Il sera le juge des nations, L’arbitre d’un grand nombre de peuples. De leurs glaives ils forgeront des socs de charrue, Et de leurs lances des serpes: Une nation ne tirera plus l’épée contre une autre, Et l’on n’apprendra plus la guerre.
(Ésaïe 2.4)
Un monde où même,
Le loup et l’agneau paîtront ensemble,
Le lion, comme le bœuf, mangera de la paille,
Et le serpent aura la poussière pour nourriture.
Il ne se fera ni tort ni dommage
Sur toute ma montagne sainte,
Dit l’Éternel.
(Ésaïe 65:25)
C’est ainsi que se termine la troisième strophe du chant de Souad Massi :
non pas un pays où les gens marchent sur l’or, mais meurent de faim et de soif
mais un paradis sur terre, plein de fleurs et d’enfants heureux,
… avec des rivières qui y coulent.
Belle description du paradis rêvé. Que le Royaume de Dieu vienne sur terre !
