Le chanteur originaire de la Réunion a sorti un nouvel album en novembre 2023, qui sera malheureusement son dernier. Celui-ci souffre en effet d’une dégradation de la voix qui l’empêche d’assurer la promotion de sa musique dans des conditions réelles. C’est ce qu’il a déclaré de son bel accent créole récemment. Coup dur pour cet artiste qui avait remporté une Victoire de la musique (interprète masculin) en 2002.
J’ai choisi de commenter une de ses plus célèbres chansons, J’en rêve encore, sortie en 2000, issu de son album Marcher dans le sable.
Texte de Goldman
Gérard De Palmas a fait appel à Jean-Jacques Goldman pour l’écriture de ce texte, sur le lequel il a lui-même composé les mélodies.
Le parolier développe un chemin progressif autour du thème de la mort, nous y reviendrons.
Il y a une belle adéquation entre les mots en la langue française et les rythmes de cette chanson pop-rock (ce qui n’est vraiment pas toujours le cas). L’auteur-interprète de J’étais sur la route toute la sainte journée sait manier la prosodie des mots pour les faire sonner et a su forger un style à lui.
Une trouvaille du refrain permet de faire résonner particulièrement le titre. c’est de placer un « Oooh » juste avant. Remarquez comment cela nous pousse à chanter avec lui « J’en rêve encore ! »
Repérons auparavant quelques clés d’analyse musicale de cette ballade sur fond de déception amoureuse.
Une structure classique
La structure, c’est la façon dont s’enchainent les éléments d’une chanson : en gros, les couplets (aux paroles différents), le refrain (aux paroles identiques) et le pont (brisure ou parenthèse, pour mieux revenir ensuite à la chanson). Dans la plupart des chansons, il faudrait ajouter encore le pré-refrain, mais il n’y en a pas dans J’en rêve encore.
On est dans de ce qui se fait de plus classique ici :
Couplet 1
Couplet 2
Refrain
Couplet 3
Refrain
Pont (seul élément en tonalité majeure ici)
Refrain
Base rythmique solide
Gérald de Palmas aime beaucoup la batterie et cela s’entend dans ce titre. La basse et la batterie (en cross-stick sur les couplets = baguette frappant le cercle de la caisse claire) proposent un socle solide pour porter les autres instruments (surtout des guitares, et un piano). Notez les petits « breaks » avant les couplets : On arrête tout pendant 2 temps pour laisser le chant démarrer. Simple et efficace.
Notons le rôle du piano dans ce titre : on peut l’assimiler à une percussion. Il est utilisé par petites notes (mixées sur le canal droit dans la stéréo), mais pas du tout comme mélodique. L’essentiel de l’harmonie est assurée par les guitares, mais aussi par les violons (et les chœurs).
Une note qui change tout
La tonalité de base de la chanson est en Do♯ mineur. De Palmas avec sa guitare modifie subtilement cet accord au début de chaque cycle d’accord. Et cela devient un La/Do♯. Il suffit d’une note pour changer un accord ! Ce trick sera repris tout au long de la chanson (aussi par les violons dans le refrains).
Sombre désespoir
Parlons un peu du texte et cherchons à comprendre son message. Les couplets entrainent le chanteur toujours plus vers un sentiment de mort. Suite à une déception sentimentale, celui-ci expérimente la rupture au plus profond :
Je suis presque mort,
Quelques mois et c’est bon (Couplet 1)Un morceau de glace
À la place du cœur (Couplet 2)Ne plus rien sentir
Inconscient, minéral [= comme une pierre] (Couplet 3)
Le pont rend les choses encore plus claires :
Vivant, mais mort
N’être plus qu’un corps
Et pourtant, le refrain continue à montrer des signes de vie (« même si je m’améliore »). Si tout le reste s’effondre jusqu’à la mort, il continue de rêver ! Amèrement certes, mais rêver tout de même. Douloureusement certes, mais cela montre qu’il reste malgré tout vivant.
J’en rêve encore,
Longtemps, encore…
La pensée qu’une autre personne puisse conquérir le cœur de l’âme aimée le pousse même à dire dans le dernier refrain, avec ce jeu de mots
Ooh, j’en crève encore
Désespoir
Oui, l’inépuisable thème en chanson qu’est celui de la déception amoureuse développe des sentiments profonds et parfois très sombres. Et parfois, il n’y a personne à qui parler de ces rêves qui continuent à nous hanter et qui nous plongent dans le désespoir.
Heureusement, nous pouvons trouver en la personne de Dieu une personne qui nous écoute et qui est sensible aux cœurs brisés, en ramenant la vie là où la mort s’installe. C’est ainsi que l’exprime, par exemple, un Psaume de David :
Quand les justes crient, l’Éternel entend,
Psaume 34.18-19
Et il les délivre de toutes leurs détresses;
L’Éternel est près de ceux qui ont le cœur brisé,
Et il sauve ceux qui ont l’esprit dans l’abattement.
Que Dieu puisse réconforter tous les cœurs brisés, en leur redonnant une espérance !