Où est Maman ?
Cette chanson est angoissante. Les Berlinois de Rammstein n’ont, de toute manière, jamais peur de nous faire peur ! Alors que son titre (2001) pourrait nous donner envie de l’interpréter pour la fête des mères, son sens est à l’opposé : c’est l’absence de mère qui est le thème principal.
L’auteur du texte se sent orphelin depuis toujours, et multiplie les métaphores « trash » pour décrire son sentiment :
Je jette ce cordon
Je n’ai pas de nombril
Je n’ai pu téter aucun sein
Je suis né dans un tube à la place d’un ventre
Personne ne m’a donné de nom
Les babils d’enfants dans l’introduction contrastent avec l’image que l’on se fait d’un bébé qui grandit avec l’amour d’une mère. On comprend alors bien vite, au fil du texte, que ce bébé est bien malheureux. (Deux membres du groupe Rammstein admettront qu’ils se sentent eux-mêmes concernés par cette cruelle absence d’une mère.)
Le manque engendre la haine
L’écoute de la chanson peut s’avérer éprouvante, car elle est morbide et violente. Elle nous confronte à nos propres angoisses, et surtout à la manière dont on peut y réagir.
Les refrains de la chanson sont simples : ce sont des appels désespérés, des cris déchirants en direction d’une mère qui n’est pas là.
Mutter!
Mutter!
Mutter!
Mutter!
Le protagoniste de ce texte développe une telle haine envers cette « mère qui ne m’a jamais mis au monde » qu’il en vient à désirer la tuer, à la « noyer dans le fleuve ». Et cela, même si cela le plonge lui-même dans un horrible désespoir.
Notons sans nous y attarder qu’une autre interprétation possible du texte est la mise en scène d’un avortement : le bébé à naitre ne verrait jamais le jour, ce qui plongerait la mère dans un désespoir profond.
Prendre soin des siens
Cela nous donne l’occasion de réfléchir sur deux tableaux :
- Sommes-nous présents pour les nôtres, pour ceux que nous aimons ? C’est là notre mission première, à chacun de nous : prendre soin des siens, de ceux que Dieu nous confie.
« Si quelqu’un ne prend pas soin des siens, et principalement de ceux de sa famille, il a renié la foi, et il est pire qu’un incroyant. », nous rappelle la Bible en 1 Timothée 5.8.
Vouloir vivre en croyant, c’est chérir nos enfants, nos parents, notre conjoint, mêmes si cela nécessite du courage (« Mutter, gib mir Kraft! »).
- Jusqu’où laissons-nous aller notre déception, notre ressentiment, voire notre colère envers ceux qui nous ont causé du tort (soit par leur présence, soit par leur absence d’ailleurs) ?
Le désir de tuer, en fait, n’est qu’une version extrême de la haine qui se développe si facilement dans notre être intérieur. Prenons garde à ne pas commettre le mal en laissant libre cours à notre colère (et Jésus ajoutera que même insulter quelqu’un, cela relève déjà de la haine).
Côté musique
Cette ballade rock mise sur la puissance et la simplicité. Trois accords (Em, C, B) se partagent les différentes couches du gateau sonore. Les cordes enveloppent harmonieusement le tout, avec quelques trouvailles originales après le premier pont, notamment une délicieuse descente « si la♯ fa♯ » (apprécions le la♯) ou une modulation +1 ton bien amenée.
Ce qu’on appelle parfois du metal industriel est bien reflété ici : ça sent le garage, les guitares huileuses, la caisse claire qui résonne.
Une voix lead
Mais ce qu’il faut reconnaitre est le talent du frontman Till Lindemann, qui utilise son organe vocal comme un vrai instrument de musique. Il lui suffit de trouver la bonne variation pour conduire le morceau vers l’intensité désirée.
Tel un jeu d’acteur, son chant véhicule une large palette d’émotions (innocence, tristesse, ressentiment, violence, assurance, haine, inquiétude, désespoir). Même si le personnage joué par Lindemann revêt des aspects effrayants, remarquons qu’il sait faire vibrer sa voix toujours au bon moment. La langue allemande (ce qui est très rare pour un groupe international) et le roulement de r ajoute évidemment au lyrisme très particulier de la musique de Rammstein.
Bonne fête Maman
Ne passons pas à côté de saluer toutes les mamans, toutes celles qui font de leur mieux pour entourer leurs enfants. Merci Maman !
