Rose et armureAntoine Élie – La rose et l'armure

La rose et l’armure est le titre phare de l’unique album du Normand Antoine Élie (Roi du silence prélude, 2020). Discret, ce poète et musicien « se fait remarquer par sa plume acérée et un début de carrière marqué par un album célébré par la critique » (source).

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Une chanson d’amour

C’est une belle chanson d’amour. L’histoire de la rencontre entre deux personnes. Chacune semble être prête à aider l’autre, à vivre des amours réelles. Mais on sent que chacun désire, quelque part, se protéger. C’est le sens de l’armure dans ce titre. Les fragilités humaines font que l’amour véritable peut faire un peu peur. Peur d’être dévoilé, d’être mis à nu devant une personne avec qui on veut avancer.

Ce qui ressort fortement, est le souhait de se défendre l’un l’autre, et d’accepter l’autre avec ses fragilités.

Il y a de la place sur mon épaule
Pour une rose et son armure.

La rose et l’armure, un oxymore

Les deux mots de la chanson (qui ne sont pas sans rappeler le nom du groupe californien Guns N’ Roses !) forment ensemble un oxymore parlant : deux univers différents sont évoqués sous ce titre : paix et guerre, amour et combat, cadeau pour l’autre et renfermement vers soi, tendresse et défense.

La rose, c’est le trésor qu’on trouve en l’être aimé. C’est la délicatesse d’une âme sœur, de laquelle on veut prendre soin. C’est le parfum authentique d’une existence fragile.

L’armure, c’est la carapace. Celle qui refuse de se dévoiler, mais qui préfère se protéger. C’est l’arme défensive qui veut défendre notre être le plus intime.

Chez nous tous pourtant, la rose et l’armure se côtoient souvent.

Avec ma rose j’ai fait la guerre
à mon envie de voyager.

(couplet 2)

Traversant tous les bruits du monde
Avec ma fleur à mes côtés

(couplet 3)

La fin de la chanson est très émouvante : alors que l’armure de l’autre « rose » commence à se fissurer, c’est celle du chanteur qui se raidit. Celui-ci a également un passé de « guerrier triste et abîmé », et ce dévoilement parait une offense pour l’autre.

C’est en tous cas comme ça que j’ai interprété cette troisième strophe !

J’ai croisé un ruisseau immonde
Qui a crû bon de refléter
L’image d’un monstre aux plaies profondes,
Un guerrier triste et abîmé.
Comment, ma rose, peux-tu subir
Pareille offense à ta splendeur ?
Et comment puis-je réussir
À oublier quelle fut l’erreur ?
De t’arracher à ton jardin
à cause d’un vide dans mon cœur
Mais elle m’arrête et puis m’embrasse ;
Ma rose rit, et moi je pleure.

Bible

La Bible est très réaliste sur la personne humaine. Elle sait très bien de quel « bois » nous sommes faits (puisque c’est le Créateur qui s’y révèle).

Un exemple parmi d’autres, celui du disciple Pierre, qui est passé de l’armure à la rose, dans les pleurs. Celui-ci fait le fort devant Jésus et devant les autres, en refusant de montrer ses faiblesse intérieures. Ce qui compte, c’est de se montrer puissant.

Mais un peu plus tard, Pierre fond en larmes après avoir trahi Jésus. Il avait beau aimer son maitre, l’armure semblait solide. Mais elle a cédé à cause de ses faiblesses.

Nous en tirons ainsi la leçon suivante : tous, même les plus forts, sont appelés à passer par le chemin de la faiblesse. Ceci est confirmé par Paul dans une de ses lettres :

Car, quand je suis faible, c’est alors que je suis fort.

2 Corinthiens 12:10

Jésus, le modèle de la douceur, est venu briser nos armures. Mais pas par la force ou la violence d’un combat. Avec la tendresse de son amour, avec la délicatesse d’une rose.

Comme une rose foulée sous nos pieds
Tu m’as sauvé, tu m’as aimé,
Par-dessus tout !

Above All (Michael W. Smith)

Musicalité des paroles

Le chanteur à la voix rocailleuse aime les mots. Son phrasé se pose parfaitement sur les quatre accords de cette chanson (ceux-ci ne varient jamais).

On est dans le registre dans la chanson à texte, et moins dans la mélodie. (Beaucoup de titres d’Antoine Élie sont plus pauvres en mélodie, lui qui se dit influencé par le rap français.) Cependant, le refrain offre une ligne mélodique mettant bien en valeur « ma rose », comme une déclamation amoureuse sans retenue.

Ici, c’est la musicalité des paroles qui réjouit. Le chanteur, qui a fait un stage « Voix du Sud » avec Francis Cabrel à Astaffort s’inscrit bien dans la lignée du chansonnier du Sud-Ouest sur ce titre. On apprend même que sa guitare Takamine est dédicacée par Francis Cabrel.

Le texte est composé en octosyllabes (à quelques rares exceptions près), soit des vers de huit syllabes en rimes croisées.

Cela donne un texte puissant et très chantant.

L’octosyllabe est un vers particulièrement musical, du fait du retour fréquent de la rime, et permet ainsi une grande harmonie.

Charpentreau, cité sur Wikipedia

Accompagnement

Quelques noms sont cités comme ayant œuvré avec Antoine Élie sur ce titre, comme Luke et Dr. Swing, ou Yann Le Men (qui ont travaillé sur pas mal de production hiphop et RnB dans les années 1990 et 2000, comme Larusso ou Diam’s).

La production est simple et sobre. Une guitare bien mise en avant, quelques effets éthérés, et un délicieux quatuor à cordes dans la dernière partie.

Le titre est proposé en trois versions différentes sur l’album :

  • La version par défaut reçoit une production électronique avec quelques kick « drill » qui donnent un effet « half step ».
  • La version radio edit est plus rythmée et à peine plus dansante avec un 4-on-the-flour qui donne un ton légèrement différent à la chanson.
  • La version remix (par le Suisse Kadebostany) est bien un remix, et on voyage dans des harmonies différentes. Assez bien réussi.

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