En lévitation !Dua Lipa – Levitating

Un énorme tube de la chanteuse anglaise Dua Lipa que Levitating. Ce tube disco-pop-électro-un-peu-tout de 2020 est efficace, rythmé, sans temps mort, bien arrangé.

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On est tout de suite happé par les chœurs synthétiques, qui installent la grille d’accords; celle-ci ne bougera plus d’un iota de toute la chanson ! Que des accords mineurs :

Bm   F♯m   Em   Bm

Une basse qui soutient et des clap-claps

On voit dans ce titre le rôle important que peut prendre une basse (ce qu’affectionne Dua Lipa dans beaucoup de ses titres, par exemple le riff très “Jamiroquai” de Don’t start now).

On sent les doubles croches bien ciselées, précises, et parfois slappées. C’est quand le bassiste tire un peu plus violemment sur ses cordes pour les faire claquer. Ce qui, combiné à un jeu plus normal aux doigts, fait varier la ligne de basse et lui donne un aspect sautillant. La basse devient un vrai instrument de percussion.

Un des amusements musicaux est le « clap-clap », à la fin de toutes les mesures paires du titre. Essayez de le repérer, vous ne verrez plus que ça, et vos mains frapperont toutes seules tous les 8 temps.
Ce clap-clap sert aussi de « break », c’est-à-dire une préparation rythmique (qui casse le rythme normal) en vue de l’élément structurel qui va débuter juste après (couplet, refrain, etc.).

Un bon vieux half-step

Avant le dernier refrain, on observe un half-step : la rythmique se dédouble, pour offrir un petit moment de pause, avant la reprise acapella du refrain.

Le half-step (je crois qu’il n’y a que moi qui l’appelle comme ça), ou half-time, c’est placer les temps accentués par la caisse claire non plus sur 2 et 4, mais seulement sur 3.

1      2      3      4      1      2      3      4
poum   tchak  poum   tchak  poum   tchak  poum   tchak
(En half-step, ça devient :)
1      2      3      4      1      2      3      4
poum          tchak         poum          tchak  

Brève analyse des lignes mélodiques

On remarque trois mouvements dans la mélodie. Si les lignes de chant n’exploitent pas beaucoup de notes (moins d’une dizaine) celle-ci sont intéressantes sur le plan rythmique, car elles sont complémentaires !

  • La mélodie du couplet : elle remplit tous les trous, en descendant les notes de la gamme, et ne s’arrête que juste avant le fameux clap-clap.
  • La mélodie du pré-refrain : elle laisse passer le premier temps, avant de proposer une petite ligne saccadée rapide.
  • La mélodie de refrain : elle fait l’inverse, en occupant largement les premiers temps, et laissant le reste de l’espace plus libre.

Chœurs et contrechants daft-punk-y

Comme dans beaucoup de tubes dance, les chœurs sont à l’honneur, avec des voix qui soutiennent la chanteuse d’origine kosovare, presque en mode chorale. En concert, ce sont les voix qu’elle va privilégier, comme dans ce Tiny Desk Concert.

L’arrangement de Koz est par ailleurs truffé de petits contrechants transformés à l’autotune, style Daft Punk. Au lieu de petites guitares çà et là, ces petites sucreries viennent combler astucieusement les petits temps morts du refrain, après ces premiers temps de la mesure bien chargés.

J’ai besoin d’amour, répondez à mes besoins

La thématique des paroles est très « moderne » : j’ai besoin d’amour, et il faut que l’on satisfasse mes besoins. La mise en scène d’un coup de foudre amoureux donne lieu à des comparaisons démesurées, à l’échelle galactique.

I got you, moonlight
You’re my starlight

Je t’ai attiré, mon clair de lune
Tu es ma lumière étoilée
(ça rend vraiment moins bien en français !)

Début du refrain

Cet attrait stellaire rend capable l’interprète de léviter.

Toutefois, cette aspiration à l’amour ressemble plus à un désir égoïste, dans lequel l’autre n’en deviendrait plus qu’un moyen de s’envoler, quitte à être seul.

J’ai besoin de toi toute la nuit,
Viens, dance avec moi,
Je suis en lévitation

Suite du refrain

« Toute la nuit », oxymore qui fait paraitre la nuit très longue, mais qui est réalité, pour une relation amoureuse, constitue un temps extrêmement court !

On peut donc s’imaginer cette image dans laquelle l’interprète s’envole, laissant au sol sa conquête amoureuse, en-dessous de ses propres désirs.

N’est-ce pas là un des symptômes de notre vision étriquée de l’amour de nos jours ? C’est un besoin personnel, et pas de relation. C’est un besoin d’une nuit, et pas d’une vie.

DaBaby, plus mégalomane que jamais

Le titre Levitating a été réédité un peu plus tard avec un featuring d’un rappeur, DaBaby. Sa venue dans la chanson, mettant en avant un égo surdimensionné (probablement joué intentionnellement) ne fait rien d’autre que renforcer cet aspect égoïste de la conquête amoureuse. Et au passage de faire la promotion du réseau social Tiktok, qui suit certainement, sous certains aspects, la même tendance : mettre en avant une série d’égos que l’on admire et que l’on sert.

You want me,
I want you baby.

Même si le début du pré-refrain parait décrire une relation réciproque, on reste dans ce paradigme « tu es là pour moi. »

L’amour se donne, avant de se recevoir

La Bible répond au « tu es là pour moi » avec un autre message : « je suis là pour toi ». Jésus-Christ est venu illustrer en personne cette recommandation exprimée par Paul dans la lettre aux Philippiens :

Que personne ne recherche son propre intérêt, mais que chacun de vous pense à celui des autres.

Philippiens 2.4

S’il est difficile de donner plutôt que de recevoir, il y a pourtant bien du bonheur associé à cela. C’est aussi une parole biblique qui dit :

Il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir.

Actes 20.35

Quel plus bel exemple que celui de Jésus-Christ, qui est venu de son ciel étoilé et resplendissant pour toucher le sol des êtres humains en venant se donner.

Pas besoin donc de léviter pour atteindre le ciel. Il est là, à portée de main. À portée de foi.

Interview de Dua Lipa et de Kod, 2020.

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